Jean Lecoultre a pratiqué la gravure depuis les années 1960, en collaborant notamment avec Pietro Sarto et Edmond Quinche aux Presses artistiques de Pully, à l’Atelier de taille-douce de Villette et enfin, dès 1971, à l’Atelier de Saint-Prex. Même s’il lui est arrivé de recourir par moment au vernis mou ou à l’aquatinte, la grande majorité de sa production gravée est consacrée à la lithographie, une technique qui, tout en permettant une grande liberté dans la composition, s’accorde aussi particulièrement bien avec son intérêt marqué pour le traitement des matières. Aux planches parvenues par le biais du « dépôt légal » de l’Atelier de Saint-Prex, s’ajoutent plusieurs peintures et dessins provenant notamment du don Isabelle et Jacques Treyvaud.
Né en 1930 à Lausanne, le peintre et lithographe Jean Lecoultre est profondément marqué au cours de son adolescence par le surréalisme, qu’il découvre notamment par le biais de la revue Minotaure. Suite à cette révélation, le jeune homme s’essaie dans un premier temps à la poésie, avant d’envisager une carrière de peintre. Face à l’opposition de son père, il est contraint de renoncer à étudier aux Beaux-Arts. Il entre alors à l’École de commerce de Lausanne, occupe un poste d’agent de contentieux chez Swissair, avant de rencontrer un certain Pietro Sarto. En 1951, il prend la décision radicale de quitter la Suisse pour l’Espagne, afin de se consacrer entièrement à la peinture. À Madrid, où il vivra jusqu’en 1957, Lecoultre fréquente les peintres de l’avant-garde, notamment les frères Carlos et Antonio Saura, avec lesquels il participe à ses premières expositions. Parallèlement il commence à se faire un nom en Suisse, obtenant une Bourse fédérale des Beaux-Arts et prenant part en 1955 à l’exposition des Jeunes peintres suisses romands à la Kunsthalle de Berne. En 1957, Lecoultre revient définitivement à Lausanne. Sa peinture connaît alors une profonde transformation : les paysages et les figures inspirés par son séjour espagnol laissent place à des compositions plus complexes qui emploient un langage visuel souvent inspiré par l’image télévisuelle ou cinématographique. Au cours des décennies suivantes, sa peinture continue d’évoluer, donnant naissance à un univers très particulier, où évoluent des fragments de construction disparates, des objets de la vie quotidienne ou encore des figures évanescentes. En 1978, il est désigné pour représenter la Suisse à la 38e Biennale de Venise. Son travail est reconnu par d’importantes expositions rétrospectives au Musée Cantonal des Beaux-Arts de Lausanne (1990) et à la Fondation Gianadda à Martigny (2002). Au printemps 2022, un an avant sa mort, la Fondation William Cuendet & Atelier de Saint-Prex lui consacre une exposition au Pavillon de l’estampe du Musée Jenisch Vevey.