De l’artiste français Pierre Bonnard, la Fondation William Cuendet & Atelier de Saint-Prex possède quelque 28 œuvres, dessins, lithographies et eaux-fortes, qui proviennent essentiellement du legs de Gérard de Palézieux. Ce dernier professait en effet une grande admiration pour le dessinateur de Parallèlement, et en particulier pourses illustrations de l’édition de Daphnis et Chloé parue chez Vollard en 1902 et rééditée par l’éditeur vaudois Henry-Louis Mermod en 1948.
Grand maître de la couleur en peinture comme en gravure, Pierre Bonnard, né en 1867 à Fontenay-aux-Roses, grandit dans une famille de la petite bourgeoisie parisienne et développe très tôt un vif intérêt pour l’art, tout en menant avec aisance des études qu’il achève en 1888 par une licence en droit. Il se tourne alors vers la peinture en intégrant l’Académie Julian, où il rencontre de nombreux artistes, dont Édouard Vuillard, Maurice Denis et Paul Sérusier, avec lesquels il forme bientôt le groupe des Nabis. C’est pourtant dans le domaine graphique que Bonnard va d’abord se faire connaître. Avec France-Champagne (1891), il est l’auteur de la première véritable affiche artistique en couleurs, qui incitera Toulouse-Lautrec à s’engager sur la même voie.
Alors que ses premières compositions portent encore la marque de l’estampe japonaise qui, à cette époque, fascine de nombreux jeunes artistes, Bonnard se libère peu à peu de cette influence dans ses planches ultérieures, souvent consacrées aux sujets intimes ou aux scènes de la vie parisienne. Encouragé notamment par le célèbre marchand Ambroise Vollard, Bonnard est sans conteste l’un des principaux acteurs du formidable essor de la lithographie en couleurs. En 1896, notamment, à l’occasion du premier Album de peintres-graveurs édité par Vollard, l’artiste réalise, avec La petite blanchisseuse, l’une des planches les plus emblématiques de la période.
Cette collaboration se poursuit avec le second Album (1897), dont Bonnard réalise la couverture, puis avec la réunion de douze de ses lithographies publiées sous le titre de Quelques sujets de la vie parisienne (1899). L’architecture, les foules de Paris et l’impression fugitive d’un instant se mêlent dans ces planches qui témoignent d’une grande audace sur le plan de la composition comme de la mise en couleur. Même si la peinture occupe dès lors l’essentiel de son temps, dès le début du nouveau siècle, Bonnard ne se détournera jamais tout à fait de la lithographie. Il illustrera également avec talent plusieurs ouvrages, toujours chez Vollard, dont le célèbre Parallèlement de Verlaine, le roman antique Daphnis et Chloé,ou encore Dingo d’Octave Mirbeau.