La présence de Robert Nanteuil au sein de la Fondation William Cuendet & Atelier de Saint-Prex est importante. Le langage superbement maîtrisé par ce buriniste à l’aide de son outil, capable d’exprimer par la souplesse des tailles, à la fois la diversité des matières et la psychologie des personnages, a très tôt fasciné les artistes de l’Atelier de Saint-Prex. À commencer par leur maître Albert Edgard Yersin qui se penchait longuement sur ces portraits gravés afin d’en analyser et commenter les secrets. Son amour pour ces planches, où la virtuosité le dispute à la clarté et aux nuances, a suscité des engouements multiples auprès de collectionneurs proches de ce groupe de graveurs. Ainsi, notamment, de Jacques et Isabelle Treyvaud qui ont acquis de leur vivant plus de 140 planches, dont ils ont fait don à la Fondation. De son côté, Gérard de Palézieux a permis l’acquisition d’une collection quasi complète de l’œuvre gravé, auprès des héritiers du collectionneur Henri Rossier, médecin établi à Vevey au XIXe siècle. Mais presque tous les artistes ayant travaillé à l’Atelier ont acquis à un moment ou un autre, un ou plusieurs des portraits au burin de cet artiste.
Généralement considéré comme l’un des plus grands portraitistes de son temps, Robert Nanteuil contribue activement au renouveau de l’estampe française au cours du Grand Siècle. C’est en marge de sa formation classique au collège des Jésuites de Reims qu’il réalise ses premières gravures, inspirées de Jacques Callot et de Claude Mellan. Nanteuil développe ensuite sa maîtrise du dessin et du burin dans l’atelier d’un graveur rémois formé à Paris, Nicolas Regnesson. En 1646 il s’installe à Paris, où il fait deux rencontres décisives : celle du peintre Philippe de Champaigne, qui lui transmet certains principes de l’art du portrait, et celle du graveur Abraham Bosse, à qui le jeune graveur ne se prive pas de demander des conseils dans l’art de la taille-douce. Ses progrès sont alors rapides, et ses petits portraits, généralement destinés à des illustrations d’ouvrages, deviennent vite très prisés. Homme lettré, doté d’un caractère particulièrement agréable et sociable, Nanteuil se fait apprécier au sein des cercles érudits et des plus hautes sphères du pouvoir. En 1658, il est nommé graveur ordinaire du roi. Trois ans plus tard, il est invité à réaliser un premier portrait, d’après nature, de Louis XIV, lequel sera suivi de plusieurs autres. Sa destinée est d’ailleurs étroitement liée à la personne du roi puisque c’est au retour d’une dernière séance de pose à Versailles qu’il tombe malade et meurt à Paris le 9 décembre 1678.